Le soleil était au rendez-vous, il faisait bon. Une vingtaine de personnes, sans compter les enfants, s’étaient déplacées. Pas une foule, mais des habitants des Rotours étaient là, c’était l’essentiel : merci à eux !
Comme à chaque fois, la rencontre a commencé par une présentation de l’initiative, puis les échanges se sont ouverts sur les sujets qui préoccupent.
Il a notamment été question de la relation entre la commune nouvelle et l’intercommunalité. Les personnes présentes étaient en forte demande de comprendre le fonctionnement de la municipalité et ses liens avec la Communauté de Communes En fil rouge, un certain mécontentement sur les conséquences de la fusion dans les bourgs : la disparition des mairies de proximité. “Il n’y a même plus de drapeau au-dessus du bâtiment de la mairie, c’est triste !” C’est un sentiment d’abandon qui domine.
Comme d’habitude, nous avons formé des petits groupes sur des thématiques décidées sur la base des premiers échanges. Voici leur restitution.
Groupe 1 : Lien social et mobilité
Le marché de Putanges : un rendez-vous à réinventer ?
Le marché du jeudi matin, une tradition centenaire… mais est-ce que ça correspond encore aux rythmes de vie d’aujourd’hui ? Cette question a animé les échanges. Beaucoup se déplacent vers le marché de Falaise, alors que pourrait-on imaginer pour celui de Putanges ?
Le jour pose question. Comment venir le jeudi matin quand on travaille ou qu’on a des enfants à l’école ? Le samedi semble compliqué avec la concurrence de Falaise et Flers. Et si c’était le dimanche ?
Une autre idée est venue : des navettes depuis les différentes communes. Pas seulement pour faire ses courses et repartir aussitôt, mais pour créer un vrai temps de présence au bourg. Un moment où l’on prendrait le temps de flâner, de croiser du monde, de faire vivre les commerces. Car la mobilité, ce n’est pas qu’une question pratique d’aller d’un point A à un point B. C’est aussi sortir, prendre l’air, avoir des occasions de rencontres imprévues.
Ce temps de marché pourrait devenir un moment fort où l’on pourrait concentrer des activités pour les enfants, de la musique, du dessin…
Il a été rappelé que le transport relève de la Communauté de Communes. Mais si c’est important pour les habitants, est-ce que ça ne mérite pas d’être réfléchi quand même ?
Et les communes historiques dans tout ça ?
Cette idée de dynamiser le marché de Putanges a soulevé une question importante : en concentrant tout le dimanche matin au chef-lieu, ne risque-t-on pas d’abandonner encore un peu plus les bourgs ?
Les réalités démographiques et géographiques rendent difficile la relance des activités viables partout. Mais il existe déjà des temps forts qui animent les communes historiques : le barbecue de fin août de Saint-Aubert, la bourse aux jouets de Cheênedouit…
Ces rendez-vous sont déjà ancrés, créent du lien, font une identité aux bourgs. Ne faudrait-il pas d’abord les préserver et les soutenir, plutôt que d’inventer des choses artificielles juste pour le principe de décentraliser l’activité ?
Certains évènements ont disparu, comme le méchoui de la Forêt-Auvray. Les comités des fêtes semblent essentiels pour maintenir la vie dans les bourgs. De quoi auraient-ils besoin pour continuer ?
Un café associatif, pourquoi pas ici ?
L’exemple du Préau au Perche a été évoqué : un café associatif et culturel avec potager, porté par des bénévoles. Au départ, ça peut sembler très “nouveaux habitants” ou “jeunes”. Pourtant là-bas, c’est devenu un vrai lieu intergénérationnel où anciens et nouveaux se côtoient.
La recette ? La mairie a mis à disposition un local pour une somme modique. Qu’est-ce qui empêcherait d’imaginer la même chose à Putanges ?
Face aux commerces traditionnels qui peinent à survivre, est-ce qu’il y a d’autres formes à essayer ?
L’accès à l’information et le lien entre générations
Parfois des choses se passent, mais tout le monde n’est pas au courant. Comment s’assurer que l’information circule vraiment ? Et même quand les gens savent, ils n’y vont souvent pas s’ils ne connaissent personne sur place.
La clé, c’est de recréer du lien, de trouver des prétextes à la rencontre et à la solidarité entre voisins.
Le club des anciens : où en est-il ? Est-ce qu’on pourrait créer davantage de liens entre l’école et le collège, favoriser les rencontres intergénérationnelles ?
Une idée originale a été lancée : offrir un abonnement gratuit à un journal local à partir d’un certain âge pour que ces personnes restent connectées au monde. Pourquoi pas les invendus de la veille ?
Groupe 2 : Plus de démocratie locale
Un sentiment d’abandon
Le ressenti est fort : tout se passe à Putanges. L’impression de ne plus avoir d’interlocuteur, de ne plus compter vraiment. Il a été évoqué que le patrimoine immobilier des communes historiques serait bradé pour financer des travaux à Putanges. Comment en est-on arrivé là ?
”On n’est plus au courant de rien”
L’accès à l’information pose problème. Les comptes rendus de conseils municipaux seraient difficiles à obtenir et insuffisants pour suivre vraiment l’actualité communale. Cette opacité a été reliée au manque d’opposition. Quand il n’y a pas de débat, qu’est-ce qui garantit que les différents points de vue sont entendus ? Une remarque intéressante : on ne donne pas assez la parole aux agents municipaux. Pourtant, ils et elles pourraient avoir des apports précieux sur la gestion de la commune, de par leur connaissance du terrain.
Des pistes pour plus de transparence
Plusieurs idées ont émergé :
- Des moments conviviaux après les conseils municipaux : des pots ouverts à tous les habitants, où chacun pourrait échanger librement. Un temps informel pour poser ses questions, partager ses préoccupations, sans protocole.
- Des conseils municipaux itinérants : tenir les séances à chaque fois dans une commune historique différente. Ainsi, tout le monde aurait l’opportunité d’assister à un conseil proche de chez soi. Est-ce que ça rendrait ces réunions plus accessibles ?
Les conseils de village : avec quel pouvoir réel ?
L’idée des conseils de village est revenue sur la table. Des instances de proximité où les habitants pourraient partager leurs idées et préoccupations sur la vie de leur bourg.
Mais une question essentielle a été posée : ces instances auraient-elles un budget dédié ? Car sans moyens, même avec les meilleures intentions, que pourrait-on vraiment faire ?
Décentraliser le pouvoir, c’est aussi décentraliser le budget. Rapprocher les décisions des habitants, c’est leur donner les moyens d’agir. Réserver du budget pour la vie des bourgs, avec les habitants aux commandes : est-ce que ça ne serait pas une façon d’éviter que tout parte vers Putanges-Pont-Écrepin ?
Autres échanges informels sur le lien social et la solidarité
Besoin de retrouver du lien de façon authentique
Pour les personnes présentes, ce qui permet vraiment d’être en relation avec les autres habitants, ce sont les événements conviviaux du comité des fêtes, notamment la fête des voisins. Le club des anciens joue aussi un rôle important pour rompre l’isolement des personnes âgées.
L’évocation des facteurs d’autrefois a fait écho : ils prenaient le café chez les gens, rendaient de petits services en plus de distribuer le courrier, amenaient parfois des médicaments… Ces gestes créaient du lien. Aujourd’hui les facteurs ne semblent plus aussi libres de leur temps qu’avant et les services qui proposent de payer pour prendre des nouvelles sont perçus comme artificiels.
De même, il avait été évoqué une association de covoiturage solidaire aux précédentes réunions, RESO’AP. Des personnes présentes ont fait des retours sur le fait que ce dispositif représentait tout de même un certain budget.
Aussi, pour rompre l’isolement des personnes âgées aujourd’hui, le principe de maisons d’accueil a été évoqué. Il en existerait déjà, mais lesquelles ? Comment ça fonctionne ?
Santé et services
Sur les déserts médicaux, avis surprenant : l’offre de médecins traitants à Putanges serait correcte. Par contre, il est toujours aussi compliqué de trouver un rendez-vous chez le dentiste. Une bonne nouvelle soulignée : Élodie, médecin traitant à Putanges, forme et accueille des internes. Deux médecins se sont installés en ayant commencé ainsi. Comment favoriser l’accueil et l’installation de dentiste ?
Le tourisme : de grands discours, mais après ?
La mairie parlerait beaucoup de développement touristique, mais les structures ne suivraient pas : restaurants, logements… La maison du Vieux Saint-Aubert a été citée : pourquoi ne pas en faire quelque chose pour accueillir les visiteurs ? Un café, ou autre chose ?
Internet ? Non merci
Un point de vue tranché s’est exprimé : internet serait néfaste aux liens sociaux. Ce n’est pas une question de difficulté technique, mais un choix. Pour ces personnes, les vrais moyens de communiquer restent le téléphone et le papier : courriers, petits mots glissés…
Est-ce qu’on sous-estime l’importance de ces modes de communication plus traditionnels ?
Merci à toutes les personnes qui ont pris le temps de partager leurs préoccupations et leurs idées.
Au fils des réunions, des sujets semblent récurrents : retrouver des lieux et des moments de rencontre, préserver l’identité de chaque bourg, rendre l’information accessible à tous, rapprocher la démocratie des habitants.
Des nouvelles propositions concrètes sont ressorties : repenser le marché et sa mobilité, créer des conseils de village avec de vrais budgets, faire tourner les conseils municipaux dans les communes… Des idées plus originales aussi : un café associatif, des abonnements gratuits à la presse locale pour les aînés, valoriser la maison du Vieux Saint-Aubert…
Ce qui ressort surtout c’est de partir de ce qui existe déjà et fait sens ici, plutôt que de créer des solutions ex nihilo ou importées telles quelles d’ailleurs. Ces temps de rencontres sont des moments précieux pour sourcer les idées les plus pertinentes et adaptées à notre territoire afin d’œuvrer ensemble pour une commune qui nous ressemble et qui s’adapte aux défis de notre temps.
Le travail se poursuit et les perspectives sont motivantes !
Merci aux participants !